Hashiguchi Goyo : la sensualité en une image

Fils d’un peintre amateur, formé par un maître de peinture de l’école Kano, il intègre ensuite l’École des beaux-arts de Tokyo dont il sort major en 1905. C’est à ce moment qu’il choisit le pseudonyme de Goyo, en référence aux pins à cinq aiguilles (goyomatsu) du jardin de son père. Ses années de formation universitaire l’ont rompu à la pratique de l’art du nu à la manière occidentale. Comme ses contemporains, l’artiste s’inspire fortement de l’art européen. Depuis l’ère Meiji, un basculement s’est opéré. Après avoir tant influencé les artistes occidentaux à la fin du XIXe siècle, l’art japonais va à son tour se nourrir des œuvres des artistes modernes et des maîtres anciens du Vieux Continent. Il y a ainsi quelque chose d’ingresque dans cette Femme après le bain, qui fait irrésistiblement songer à la Baigneuse (musée du Louvre) du maître montalbanais. Le corps à la peau pâle du modèle, Kodaira Tomi, semble flotter dans l’espace, impression que renforce le fond rendu brillant par le mica. Avec cette femme offrant son dos au spectateur, Goyo crée une odalisque moderne empreinte d’une pudeur toute nipponne. Disparu prématurément des suites d’une méningite à 40 ans seulement, Goyo n’a réalisé en tout et pour tout que quatorze estampes durant sa vie. Artiste d’une grande méticulosité, ses œuvres sont d’une très haute qualité technique. Leur prix très élevé au moment de leur publication ne les empêcha pas de se vendre très facilement, les collectionneurs se montrant sensibles à l’extrême finesse des traits et à la technique si sophistiquée. Les estampes de Goyo demeurent aujourd’hui encore les plus prisées du mouvement shin-hanga, surtout quand on sait que les bois qui servirent à l’impression des originaux – et une partie des estampes elles-mêmes – furent détruits durant le séisme de Kanto de 1923.