Le colonel Antoine Pierre Manhès (1878-1943) arrive en Syrie en 1920, au début du mandat donné à la France par la Société des nations, pour faire de cette ancienne province ottomane une république laïque. Il participera ainsi à l’administration et au gouvernement du pays auprès du général Georges Catroux.
Achetées à Damas en 1925, ces boiseries l’ont suivi en France à son retour, quinze ans plus tard, et sont toujours restées dans sa famille, comme en témoignent les photographies anciennes de ce bel ensemble. Il se compose de trois portes à doubles vantaux et de leurs encadrements, de deux niches à fronton arrondi et caisson muni d’étagères, d’une partie supérieure de mihrab à muqarnas, d’une longue poutre et de vingt-quatre panneaux. Caractéristique des salons de réception des demeures ottomanes d’Alep et de Damas, il a été exécuté avec une technique syrienne ancestrale, l’« ajami », consistant à créer sur le bois des reliefs en plâtre appliqués de feuilles d’or ou d’étain, et de pigments minéraux colorés. Leur riche décor déploie bouquets floraux, vases, vues d’architectures, cartouches polylobés, volutes, arabesques, palmettes et motifs abstraits. Son intérêt réside également dans une longue frise calligraphiée portant la date de 1760-1761, reprenant la majeure partie de l’un des plus célèbres écrits d’al-Busiri, un poète soufi d’origine berbère, né en 1212 dans le sud de l’Égypte, et mort à Alexandrie en 1294. Tirant son nom de la rime en « hamza » de ses 456 vers, la Hamziyya, écrite en l’honneur du Prophète, reprend les passages notoires de la vie de Mahomet. Selon le même principe, les boiseries acquises en vente publique par le Louvre en 2023 (Christie’s Londres), pour son département des Arts de l’Islam, s’ornent également de versets du poète, cette fois calligraphiés en 1790-1791.