LA JEUNE FILLE A LA CRUCHE

La Perrette de Joseph Bernard ne casse jamais son pot, ce modèle concrétisant à chaque apparition la liste de ses envies. Il ne faut pas oublier que la Jeune fille à la cruche ou Porteuse d’eau a été conçue en 1912 et présentée au Salon d’automne de la même année, à la fin de la période art nouveau donc, et bien avant que l’art déco ne domine la création ornementale. Et pourtant, elle possède déjà les codes – corps lisse, silhouette balancée, sensualité gracieuse – de ce mouvement qui va balayer le monde. On comprend donc pourquoi elle s’est rapidement affirmée comme le modèle iconique de son auteur, le sculpteur Joseph Bernard. « Une jeune fille nue revient de la fontaine ; faible mais souple, elle porte la cruche d’eau puisée ; Ô l’agréable joliesse, la paix heureuse, la beauté fine ! », peut-on lire dans la revue La Plume du 1er novembre 1912. Et d’ailleurs, l’année dernière, le modèle en plâtre accueillait les visiteurs dans la salle dédiée à l’Exposition internationale de 1925 au Petit Palais dans le cadre du Paris de la modernité ». Cet exemplaire porte le cachet du fondeur Adrien-Aurélien Hébrard (1865-1937). De fait, l’entrepreneur, aussi réputé qu’avisé, avait remarqué les talents de son créateur et lui avait offert un contrat d’édition pour ses pièces de petites dimensions. Avec sa patine brune nuancée de vert, elle avançait sereinement vers 33 644 €. Sur son chemin, elle croisait un Poisson (h. 34,5 cm) sculpté dans l’ébène par Alexandre Noll (1890-1970), qui se contorsionnait à 28 468 € pour être remarqué de la belle.
La Guitariste d’Henri Lebasque (1865-1937) sortait aussi gagnante, grattant ses cordes avec application jusqu’à 49 172 €. La toile était reproduite page 74 de la Gazette n° 22.