Moment d'intimité

Le visage baissé, concentrée sur sa musique, cette jeune personne ne semble se préoccuper ni du peintre, ni du spectateur. Et si le modèle n’est pas identifié, il y a fort à parier qu’il fait partie de l’entourage d’Henri Martin. Son épouse Catherine, dite Ella, ses filles Marthe (1895-1989) – qui deviendra peintre et sculptrice – ou Hélène (née en 1901)… Toutes ont figuré dans ses nombreuses scènes de genre familiales, empreintes de sérénité, dans un cadre méditerranéen, souvent un jardin ou une terrasse entourée d’une végétation luxuriante. Datée 1926, cette toile à la palette chatoyante a probablement été, elle aussi, réalisée dans le Midi. La composition se focalise sur la gestuelle du modèle, et laisse dans le flou le cadre dans lequel se déroule la scène. Après la Marne, la Vendée, la Normandie et la Bretagne, Lebasque a découvert le Sud en 1906, grâce à son ami Henri Manguin. Il pose ses valises successivement à Sanary, Nice, Sainte-Maxime, Cannes, puis au Pradet, près de Toulon, avant de se fixer au Cannet en 1924. Là, il fréquente le nabi Pierre Bonnard, qui réside à proximité. Sa rencontre avec les fauves – dont il n’épousera pas la violence chromatique mais avec lesquels il exposera –, Henri Matisse notamment, qui vit à Nice, oriente sa palette et son goût vers les scènes intimistes. Si les tableaux de Lebasque sont une ode à la joie de vivre paisiblement près de la nature, dans la douceur méridionale, ils sont aussi la traduction du bonheur de peindre les siens en toute sérénité. Spontanément et sans effort apparent…