UN HOMMAGE À LOUIS XV

Quiconque se rend au château de Versailles croise Louis XIV à cheval sur sa place d’Armes, mais peu savent que cette statue aurait dû être celle de Louis XV, taillée dans le marbre au modèle de cette maquette de terre cuite… Conservée dans la descendance de son auteur, Pierre Cartellier, cette dernière lève le voile sur une histoire politico-artistique rocambolesque. Bien qu’ayant été l’un des artistes officiels de la famille impériale, le sculpteur, précédé par son excellente réputation et auréolé de distinctions, aborde sereinement la Restauration. Louis XVIII choisit effectivement ce professeur des Beaux-Arts pour réaliser une œuvre de propagande destinée à asseoir sa légitimité en rappelant sa filiation dynastique : la statue équestre de son illustre aïeul, Louis XV. Cartellier s’exécute en 1817, avec cette statuette montrant le roi chevauchant tel un empereur antique, tête laurée. La monture du Bourbon victorieux foule des trophées brisés sous ses sabots. Faute de trouver un bloc de marbre permettant sa transposition en une statue dépassant 5 mètres de haut, l’option du bronze est adoptée, obligeant à modifier la position du cheval, marchant au pas dans le nouveau modèle de 1826. Quatre ans plus tard, sa fonte était en cours lorsque survint la révolution de Juillet. Le sculpteur ne survivra pas à son œuvre inachevée. Seul vestige, le cheval resté dans le moule en 1831, sera détourné pour servir de monture à Louis XIV, sculpté par Louis-Messidor Petitot – beau-fils de Cartellier –, à la demande de LouisPhilippe. C’est ce groupe équestre composite que l’on peut voir à Versailles. Montée sur une pendule moderne, une maquette de Cartellier pour L’Inspiration du poète, façonnée en terre cuite peinte vers 1800, montre que le sculpteur était aussi à son aise pour les sujets décoratifs néoclassiques que pour la statuaire monumentale. Génie ailé de la poésie, une jeune femme se penche vers le poète qu’elle éclaire de sa torche (60 x 40 x 14 cm, 4 000/6 000 €).